Monsieur De Talleyrand

?crire la vie de M. de Talleyrand n'est gu?re chose possible, et je ne crois pas que la publication de ses M?moires tant d?sir?s et tant ajourn?s, si elle se fait jamais, y aide beaucoup. Acteur consomm?, M. de Talleyrand, plus encore qu'aucun autre auteur de M?moires, aura ?crit pour colorer sa vie, non pour la r?v?ler; s'il avait l'?propos en tout et savait ce qu'il faut dire, il savait encore mieux ce qu'il faut taire. Les rares privil?gi?s qui ont entendu quelques parties de ces fameux M?moires ont paru surtout enchant?s et ravis d'un r?cit de premi?re communion (la premi?re communion de M. de Talleyrand!) et de ses premi?res amours de s?minaire: ce sont l? en France de charmantes amorces, et qui prennent tout lecteur par son faible. Ce ma?tre accompli en l'art de s?duire et de plaire aura certes bien su ce qu'il faisait en triomphant de sa paresse pour ?crire. Mais ce n'est point la vie de M. de Talleyrand que sir Henry Bulwer a eu dessein de retracer[]; il a choisi exclusivement l'homme public, et chez celuici les principaux moments, et pas tous ces moments encore au m?me degr?. Il s'?tait propos? pour ?tude un certain nombre de personnages qu'il appelle repr?sentatifs d'une id?e, d'une doctrine ou d'une forme de caract?re, et M. de Talleyrand tout le premier lui a paru un de ces types les plus curieux. Envisag? ? ce point de vue, l'essai de sir Henry Bulwer, sans ?tre complet, est tout ? fait digne de l'homme d'?tat distingu? qui l'a ?crit, et il est piquant, pour nous Fran?ais, autant qu'instructif, de voir des ?v?nements et des hommes avec lesquels nous sommes familiers, jug?s dans un esprit ?lev? et ind?pendant, par un ?tranger, qui d'ailleurs conna?t si bien la France et qui, de tout temps, en a beaucoup aim? le s?jour et la soci?t?, sinon les gouvernements et la politique.